"Le Grand Paris avance", Daniel Canepa, lpréfet de Paris et d’Ile-de-France

Publié le par Observatoire Rémois du Bassin Parisien

Canepa : "Le Grand Paris avance"

 

Le Grand Paris reste une idée abstraite. Quelles seront les premières réalisations qui lui donneront corps de manière visible et concrète?
D'abord, je veux rétablir une vérité : le Grand Paris n'est pas en panne, contrairement à ce qu'on entend trop souvent. Même si ce projet s'inscrit dans la durée, sur 20 ou 25 ans, il avance dès à présent. On va en avoir une première preuve dans les jours qui viennent, avec la signature d’accords cadres très importants, en janvier-février, concernant six contrats de développement territorial (CDT), sur les 17 prévus. Au total, 140 communes sont concernées.

CDT, pour la population, ça ne veut pas dire grand-chose…
Il s'agit de faire sortir de terre le Grand Paris autour des gares du futur métro automatique. Ces contrats organisent concrètement ce qu'il y a de plus important pour la population : logements, urbanisme (recoudre certains territoires), maillage de transport (désenclaver des quartiers) ou développement économique. Le premier accord, signé avec Plaine-Commune-Saint-Ouen (93) - qui sera publié le 16 janvier -, porte sur sept nouvelles gares (Pleyel, Saint-Ouen, La Courneuve, Aubervilliers…) et prévoit 4.200 logements par an dès 2015. SFR et Veolia y emploieront 12.500 salariés. La cité du cinéma y sera bientôt inaugurée… On crée une dynamique, on rend le territoire plus attractif. L'arrivée du métro du Grand Paris divisera par deux, en moyenne, les temps de transport des Franciliens.

«Il s'agit de faire sortir de terre le Grand Paris autour des gares du futur métro automatique»Où verra-t-on les premières émergences du Grand Paris?
Les accords les plus avancés, qui seront signés dans les prochains jours, concernent Les Ardoines (94), Grand Roissy-Gonesse (95), le Campus santé (dans le sud parisien jusqu'à Orly), Descartes (77), Le Bourget, La Défense, Saclay… L'ambition est la même que du temps d'Haussmann ou Delouvrier, sauf que la méthode est différente, elle ne s'impose pas d'en haut: l'Etat dialogue avec les élus et la population; il y aura des enquêtes publiques fin 2012-début 2013.

En quelle année l'objectif - fixé par la loi - de 70.000 nouveaux logements par an en Ile-de-France pourrait-il être atteint, sachant qu'on peine aujourd'hui à en construire 40.000?
En 2014, ce serait bien. La marche est haute. Les deux tiers de ces 70.000 logements s'implanteront dans les territoires concernés par les CDT, autour des gares. On travaille aussi à un assouplissement des règles d'urbanisme, pour bâtir une ville compacte, qui ne s'étale pas. On se bat également sur le foncier avec la mobilisation des terrains qui appartiennent encore à l'Etat ou à des établissements publics. On a calculé que 200 km² de fonciers sont susceptibles d'être disponibles en petite couronne, soit l'équivalent de Paris.

L'Etat ne met pourtant pas un grand empressement à vendre ses terrains. À Paris, le maire Bertrand Delanoë dit avoir de "bons espoirs" pour la caserne de Reuilly dans le 12e…
La caserne de Reuilly fait l'objet de propositions pour être cédé à la mairie de Paris, ça devrait se faire. Mais je constate que Paris n'est partie prenante à aucun CDT.

L'Etat peut-il contraindre les maires à construire davantage. Envisagez-vous de passer en force, le cas échéant?
Pour l'instant, je ne pense pas qu'il soit utile de recourir à des méthodes autres que la discussion et la négociation. Chaque CDT précise le nombre de logements qu'il est souhaitable de voir émerger sur ces territoires. J'ai fait une proposition - étudiée par le gouvernement - pour qu'il y ait une aide financière aux maires bâtisseurs. Cette aide serait alimentée par les maires non bâtisseurs…

En quoi consiste le label Grand Paris que vous avez lancé fin 2011?
C'est la deuxième preuve que le Grand Paris avance. Contre toute attente, on a reçu plus de 80 dossiers : autant de projets qui veulent être reconnus comme des éléments constitutifs du Grand Paris. Pourtant, on ne distribue ni prix, ni argent. Il y a une envie de Grand Paris. Un jury choisira plusieurs lauréats fin janvier. Les candidats les plus emblématiques sont la Cité du cinéma, la Philharmonie de Paris, Europa City (un centre culturel et commercial à Gonesse)… Ce label permettra aussi de faciliter l'émergence des projets, en termes d'autorisations, de prise en compte pour les sorties des gares, etc.

«Les attaques de la Ville de Paris sont assez indécentes (...) Nous ne céderons pas au chantage»La Société du Grand Paris a lancé mi-décembre une consultation "architecture et design" pour définir le visage des futures gares. Qu'en attendez-vous?
J'ai mis en place un groupe de travail pour établir une sorte de cahier des charges afin que ces gares soient plurifonctionnelles, qu'elles servent aux transports, mais aussi au commerce, aux services, à la culture. Ce seront des lieux de centralité. Visuellement, elles devront être belles et évoquer l'identité du Grand Paris au premier coup d'œil.

À combien estimez-vous le nombre d'emplois qui pourraient être créés par le Grand Paris?
On a établi une fourchette entre 700.000 et un million d'emplois nouveaux; ce qui est énorme! Ils seront créés dans un premier temps par la construction du métro du Grand Paris et des 70.000 logements. Puis, par le développement économique et l'attractivité que nous entendons favoriser autour des gares.

Les entreprises franciliennes seront-elles privilégiées?
Je n'utiliserai pas ce mot, mais j'essaie d'expliquer aux entreprises du bâtiment, de l'énergie ou du traitement des déchets, ainsi qu'aux organismes professionnels (Medef, CGPME…), comment se préparer pour être prêts et concourir. Une mobilisation du secteur privé est en train de monter.

Le 22 décembre, l'Etat a racheté la tour Utrillo, à Montfermeil (93), pour la transformer en Villa Médicis de la banlieue. Quel était le montant de la vente?
Un peu moins de deux millions d'euros. Ce n'est pas très élevé, mais il y aura de gros travaux à faire pour rendre utilisable cette ancienne tour de bureau qui devait être démolie. Une étude est en cours pour faire des propositions de réutilisation.

Bertrand Delanoë ne décolère pas contre l'Etat à qui il reproche des coupes budgétaires de 27,8 M d'euros pour l'hébergement des familles sans abri par le Samu Social… Que lui répondez-vous?
Il sait pertinemment que cela est faux. La Ville de Paris compare des choses qui ne sont pas comparables : un budget définitif avec un budget prévisionnel. D'ici la fin de l'exercice, comme toujours, des moyens financiers seront dégagés selon les besoins pour faire face à ce problème douloureux de l'hébergement d'urgence, qui nécessiterait plutôt l'accord que les ostracismes. En plus, le Samu Social est essentiellement financé par l'Etat : ces attaques sont donc assez indécentes.

«Directeur de campagne de Nicolas Sarkozy? Je suis flatté mais je ne sais pas si j'ai toutes les qualités requises.»Le maire de Paris est aussi très remonté contre le projet de Pentagone français, à Balard. "Je m'y opposerai de toutes mes forces", dit-il.
C'est une curieuse façon d'aborder un dialogue. Quel est le rapport entre les logements sociaux que la Ville veut construire rue de la Croix-Nivert et le regroupement du ministère de la Défense à Balard? Pourquoi l'Etat, dans sa fonction régalienne, aurait-il à se préoccuper de reloger un garage à bus de la RATP déplacé par le maire de Paris? Nous ne céderons pas au chantage.

Quel regard portez-vous sur le projet d'aménagement des voies sur berge de Bertrand Delanoë?
Eh bien, nous aurons la même attention pour ce projet qu'il en a pour Balard… Ce n'est pas une menace, je dis juste que nous serons attentifs.

Suite à votre recours dans le cadre d'un contrôle de légalité, la justice vient d'annuler un avenant au marché de la Canopée, qui doit recouvrir le futur forum des Halles. Êtes-vous satisfait?
Nous avons été suivis par le tribunal administratif dans notre demande d'annulation de cet avenant qui bouleversait le marché initial. Le coût de la Canopée était augmenté de plus de 28%. L'annulation prononcée est différée au 31 mai 2012, ce qui permet à la Ville de Paris de conclure un nouvel avenant qui respectera le droit. Le projet de Canopée ne devrait pas être retardé. Mais nous aurons fait faire des économies aux contribuables parisiens.

Votre nom circule pour le poste de directeur de campagne de Nicolas Sarkozy. Quel rôle jouerez-vous précisément?
Je suis flatté, mais je rappelle que Nicolas Sarkozy n'est pas encore candidat. Je ne sais pas si j'ai toutes les qualités requises... En tout état de cause, cette fonction ne se sollicite pas et elle n'est pas compatible avec celle que j'occupe à la préfecture de région. Dans cette hypothèse, je perdrais mon emploi…

Bertrand Gréco - Le Journal du Dimanche

samedi 07 janvier 2012

Daniel Canepa, le préfet de Paris et d’Ile-de-France, dévoile au JDD les premières mesures concrètes de cet ambitieux projet de transformation de la capitale et de son agglomération. Il est également pressenti pour être le directeur de campagne de Nicolas Sarkozy en vue de la présidentielle.

Publié dans Grand Paris

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