Le pétrole de Paris: rêve des industriels, cauchemar des écolos

Publié le par Observatoire Rémois du Bassin Parisien

Trois activistes du collectif Pays Fertrois posent devant la plateforme de forage de l'Américain Hell Oil à La Petite Brosse près de Jouarre, le 25 juillet 2013 ( AFP / François Becker)

 

Au milieu des champs de Jouarre, près de Paris, une foreuse s'apprête à fendre la croûte terrestre. Préambule à l'exploitation du pétrole de schiste, s'alarment les écologistes qui doivent manifester samedi, malgré les dénégations du pétrolier américain Hess Oil.

 

Hess plaide sa bonne foi : il n'est pas dans la Brie pour pratiquer la fracturation hydraulique, controversée et interdite, mais pour cartographier le sous-sol du Bassin parisien, qui va de l'Est de la capitale aux abords de l'Alsace, explique son président pour la France, Bertrand Demont.

 

"Contrairement aux idées reçues, ce sous-sol est assez peu connu", affirme M. Demont. "Le programme de Hess en France c'est (...) d'identifier une ressource potentielle à exploiter", précise-t-il. L'enjeu : tomber sur du pétrole et rentabiliser l'investissement initial de 45 millions d'euros puis 12 à 15 millions d'euros par forage exploratoire, dont deux ont été réalisés.

 

Les militants jugent eux qu'après 50 ans d'exploitation, dont témoignent les centaines de "têtes de cheval" en métal vert qui parsèment la campagne de Seine-et-Marne, les réserves sont connues. "Les couches les plus élevées ont déjà été explorées", estime le géologue Jacques Thibieroz, pour qui Hess a "un vrai projet dans la roche mère" et le pétrole de schiste qu'elle renfermerait.

 

Ils soulignent qu'en jetant leur dévolu sur la région, les pétroliers nord-américains s'intéressaient ouvertement au pétrole de schiste. Hess, acteur majeur des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis, réalise 15% de son activité dans ce secteur.

 

Après l'attribution en 2009 du permis de Château-Thierry, qui comprend Jouarre, les industriels voulaient sonder les roches-mère par fracturation hydraulique. Le pétrole traditionnel n'était qu'un "objectif secondaire". Entre-temps, la France a interdit cette technique en 2011. Mais pour Isabelle Lévy, du collectif fertois, c'est bien la preuve que "Hess veut mettre un pied dans la porte et passer à la fracturation hydraulique" si la loi devait changer à nouveau.

 

Absurde répond Hess Oil : un groupe coté ne risquerait pas des millions sur un projet bloqué par un obstacle politique : la fracturation interdite, Hess a "adapté" son projet, argue-t-on.

La plateforme de forage exploratoire de l'Américain Hess Oil à la Petite Brosse, près de Jouarre, le 25 juillet 2013 ( AFP / François Becker)

 

La cartographie va certes permettre de localiser du pétrole "pour lequel les techniques de production (...) sont interdites" mais surtout du pétrole conventionnel dans des couches négligées jusque-là ou du pétrole de roche-mère extractible sans fracturation, escompte son dirigeant. Hess fore jusqu'à 3,5 km de profondeur, et retire environ 400 mètres de carottes, contre quelques dizaines traditionnellement.

 

Village sous tension

 

La tension est vive autour de la foreuse de 26 m de haut, dont le montage s'achevait lorsque François Hollande a déclaré, le 14 juillet, que "l'exploration du gaz de schiste" resterait interdite pendant son mandat.

 

Des hommes en combinaison et casque s'y activent entre baraquements et tubes métalliques. Les militants ont installé leurs banderoles. "On les observe, ils nous observent" à travers les grilles qui entourent le site, constate l'un d'eux Alain Ducroux.

 

De son côté, l'entreprise a rencontré maires et agriculteurs, inquiets des risques de pollution, pour présenter son projet et les précautions prises pour ce forage de deux mois: imperméabilisation du sol, lutte contre le bruit.

 

"J'utilise l'eau de mon puits, je veux être rassuré sur la transparence des contrôles" publiés par Hess, dit un céréalier, taisant son nom au motif que "tout le monde se surveille" dans le village.

Le couple d'agriculteurs qui a loué sa terre à Hess, "n'avait pas vraiment compris ce qui allait se passer" et "regrette", raconte aujourd'hui leur fille.

 

Ajoutant à la confusion, un journaliste local a été menacé après avoir publié une interview d'un dirigeant de Hess, a-t-on appris de source préfectorale. D'autre part, l'appel des anti-schiste a été relayé, à leur grand dam, sur des blogs d'extrême-droite.

 

La préfète Nicole Klein veut calmer le jeu : les pétroliers "ne sont pas des philantropes mais leurs recherches sont encadrées" et contrôlées par l'administration.

 

http://www.boursorama.com/actualites/le-petrole-de-paris-reve-des-industriels-cauchemar-des-ecolos-83325afd62f19f3fcd216f9eae6285d8

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